Bangladesh 2016

Bangladesh

Dhaka / Port fluvial de Sadarghat

Foule, toujours. Sur l’eau ou sur la berge. Foule des barques et des ferries, foule des rickshaws, foule humaine, foules inépuisables. De jour comme de nuit, le port fluvial de Sadarghat est le théâtre d’une activité frénétique.

Bruits. Moteurs des péniches, des cargos, des ferries, des barques, des rickshaws, des camions, des compresseurs qui ronflent, bourdonnent, pétaradent, vrombissent, toussotent, s’emballent, ronronnent, coups de klaxons, rumeurs de foule, cloche d’un navire, timbre des rickshaws, échos de musiques, un instant couverts par le mugissement d’un ferry qui appareille, bruissement de l’eau, appels des passeurs, clapotis des rames, bavardages des pies, sonneries de téléphones, bribes de conversations, raclements de gorge qui préludent au crachat, rires, altercations, harangue d’un mégaphone, chocs du métal contre du métal, du bois contre du bois, du métal contre du bois et inversement, encore la corne de brume d’un ferry, moteurs, klaxons, la foule, frottements de ballots qu’on traîne, de valises qu’on tire, piétinements, crescendo decrescendo d’une sirène d’usine, moteurs, klaxons, la foule… Par le port de Sadarghat transitent chaque jour quelque 150.000 passagers.

Port. Des pontons métalliques, flottants, font office de quais, ils sont couverts et reliés à la berge par des passerelles, couvertes elles-aussi. Un bâtiment en dur pour la capitainerie et l’administration. Longues listes de destinations, tarifs et horaires des ferries, peints en caractères hindi (rien en anglais), au dessus des guichets. Amarrés aux pontons, des ferries, plusieurs dizaines, tous (ou presque) construits sur le même modèle : lourde coque métallique peinte en blanc, trois ponts aérés par de larges ouvertures pratiquées dans le bordage. Le secteur du transport maritime et fluvial emploie 200.000 salariés – salaire minimum : 50 euros/mois.

Barques. Des centaines, qui s’agglutinent le long de la berge, se faufilent entre pontons et ferries, embarquent et débarquent fret et passagers. Coque de bois, goudronnée, noire, cinq ou six mètres de long, de forme lancéolée, au fond, un caillebotis de planches, généralement recouvert d’une natte sur laquelle les passagers s’assoient après s’être déchaussé. Le passeur est debout ou assis à la poupe, plus relevées que la proue, il propulse son embarcation à l’aide d’une godille – un bambou de deux mètres auquel est fixé une planchette qui fait office de pelle. La rame est engagée dans une dame de nage rudimentaire, le passeur l’utilise alternativement comme perche, godille ou pagaie – dans ce dernier cas, il s’aide souvent de son pied droit pour appuyer sur le manche. La traversée de la rivière coûte 5 takas (environ 3 centimes d’euro). On embarque à partir de la berge ou de pontons de planches supportés par des pilotis de bambou.

Rivière. Une eau épaisse, huileuse, noire, sûrement pas bleue, ni brune non plus, ni même verte, non, noire, vraiment noire. Et pour cause : selon le ministère de l’environnement, 4.500 tonnes de déchets solides de l’agglomération de Dhaka, 22.000 litres d’effluents toxiques rejetés par les tanneries d’Hazaribagh, 60.000 mètres cubes de déchets toxiques provenant des usines textiles et pharmaceutiques (elles ne disposent que rarement de station de traitement de leurs rejets) sont quotidiennement déversés dans la rivière Buriganga.

Instantanés. Un groupe descend des escaliers qui conduisent aux barques. Tenue de fête, on se photographie à tour de bras et de téléphones portables avant de rejoindre l’embarcadère. Les femmes portent des saris multicolores, brodés de motifs dorés, les hommes, en costume, les aident à embarquer. Juste à côté, une grosse barque surchargée de corbeilles vides, empilées les unes dans les autres, se fraie un chemin entre les embarcations des passeurs. En accostant, elle heurte l’esquif de l’un d’eux qui perd l’équilibre et tombe à l’eau. Ses collègues se marrent.

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