Philippines 2018

Philippines

La dictature : plus jamais !

Le 21 septembre 1972, Ferdinand Marcos instaurait la loi martiale. Quarante-six ans plus tard, alors que le régime du président Duterte, dès le début montré du doigt pour sa meurtrière guerre à la drogue, poursuit sa dérive autoritariste, des milliers de philippins se rassemblent au Rizal Park de Manille pour affirmer : « la dictature, plus jamais ! »

Dès les premiers mois de son mandat, Rodrigo Duterte avait provoqué une levée de boucliers en autorisant le transfert de la dépouille de l’ex-président Marcos au cimetière des héros de la patrie (Voir : Marcos n’est pas un héros). Mais il bénéficiait encore d’une côte de popularité record, que même les milliers de cadavres qui alimentaient les chroniques de sa guerre à la drogue n’arrivaient pas à entamer.
Aujourd’hui, en revanche, l’état de grâce semble terminé.
En recul dans les sondages pour le troisième trimestre consécutif, le président philippin doit faire face à une inflation qui, sans être dramatique, est plus élevée que celle que le pays a connu ces dernières décennies, et à un déséquilibre accru de la balance des paiements, conséquence (pour une large part) du programme de grand travaux d’infrastructures présenté comme le fer de lance de la politique économique gouvernementale.
Bien qu’il ait tenté, et plutôt bien réussi, à museler l’opposition politique et le système judiciaire (voir : La justice dans la ligne de mire du président), Rodrigo Duterte n’est pas parvenu à coopter la gauche radicale, qui refuse les nouvelles conditions imposées à une hypothétique reprise des pourparlers de paix avec l’insurrection communiste – conditions qui s’apparentent plus à une reddition déguisée qu’à une négociation.
Enfin, à force de renier, les unes après les autres, ses promesses de campagne, et notamment celle concernant l’interdiction des contrats de travail courts indéfiniment renouvelés, Rodrigo Duterte est arrivé à ce que l’on n’attendait plus : une convergence des deux gauches (l’altermondialiste-soft-social démocrate et la radicale d’obédience communiste) qui ne s’était plus produite depuis l’époque de la dictature (voir : Manille : 1er mai unitaire, enfin !).
Et aujourd’hui encore, le rassemblement pour dire non à la dictature se voulait unitaire.
Pas (encore) de quoi faire trembler le régime, mais un frémissement, peut-être…