Philippines 2018

Philippines

Manille / Arrestation de la directrice de Rappler

Longtemps que je n’ai rien écrit à propos des Philippines. L’arrestation, avant-hier, de Maria Ressa (sur la photo), directrice du site d’information en ligne Rappler, me donne l’occasion de rompre ce silence.

Mercredi 13 février 2019, des policiers font irruption dans les locaux du site d’information en ligne Rappler et arrêtent Maria Ressa et Reynaldo Santos Jr, respectivement directrice et collaborateur du site.
Motif : une plainte en diffamation déposée par un certain Wilfredo Keng, homme d’affaire largement méconnu du grand public.
Que celui qui s’estime calomnié par un article suggérant l’existence de relations entre lui-même et certains narcotrafiquants porte plainte, ça peut se comprendre.
Que l’affaire ressorte aujourd’hui, alors que l’article incriminé remonte à 2012, et que la condamnation se base sur une « loi pour la prévention des cybercrimes » qui n’était pas en vigueur à cette époque, paraît plus étonnant.

Rappler n’en est pas à ses premiers démêlés avec la justice.
En janvier 2018, le site s’était ainsi vu reprocher la part excessive d’EBay dans le capital de l’entreprise (voir : Manille / Défendre la liberté de la presse) – un état de fait qui n’est sans doute pas à mettre à son actif, mais n’empêche pas Rappler (opinion toute personnelle) de diffuser un contenu intéressant, des enquêtes approfondies et des informations souvent fiables.

Durant la campagne électorale, le candidat Duterte avait su, mieux que ses concurrents, profiter de la tribune offerte par Rappler.
Que les ennuis du média avec la justice n’aient commencé qu’après que celui-ci se soit permis à plusieurs reprise de critiquer le même Duterte, alors devenu président, est certainement une coïncidence… non ?
Et d’ailleurs, le palais présidentiel dément, la main sur le cœur, avoir la moindre responsabilité dans l’arrestation de Maria Ressa, alors, hein…

Bulatlat pour sa part, un autre site d’information en ligne lié, lui, à la gauche radicale, dénonçait il y a peu les cyberattaques dont il avait été victime et l’assassinat de 12 journalistes depuis l’accession de Duterte au pouvoir.
Mais si l’on commence à écouter ce que racontent les rouges, où va-t-on ?