Philippines 2015

Philippines

L’état de la nation… vu de la rue

C’est un rendez-vous incontournable : fin juillet de chaque année, au moment du traditionnel discours à la nation du président (SONA / State of the nation address), la gauche radicale manifeste sur Commonwealth Avenue… qu’il pleuve ou qu’il vente.

Alors qu’il entame la sixième et dernière année de son mandat, le président Benigno « Noynoy » Aquino III a prononcé un discours fleuve (plus de deux heures) pour mettre en avant les acquis de son gouvernement.
1) La consolidation du processus de paix avec le MILF (Moro Islamic Liberation Front) qui devrait se concrétiser par l’adoption prochaine de la Bangsamoro Basic Law (déjà amendée au point qu’il est permis de se demander ce qu’il reste du texte initial)
2) Une croissance économique basée sur la « compétitivité » du pays et une politique agressive d’attraction des capitaux étrangers – entendez : libéralisation à outrance, privatisation des services publics, avantages fiscaux disproportionnés pour les investisseurs (qui, quoi qu’ils en disent, n’ont pas pour habitude de partager leurs profits avec le bas peuple : ça se saurait), dérégulation des lois du travail, recours massif aux agence de main d’œuvre et répression anti-syndicale
3) Sur la question de la corruption, fléau qu’il s’était engagé à éradiquer, le président ne pouvait guère s’enorgueillir d’un succès éclatant. Il affirme cependant avoir fait mieux que son prédécesseur en abrogeant le Priority Development Assistance Fund (PDAF : une loi permettant à des élus d’obtenir des financements rapides pour certains programmes de développement locaux… qui s’était rapidement transformé en un système de détournements de fonds organisés). Le PDAF a aussitôt été remplacé par son clone : le Development Acceleration Program (DAP)… lui-même jugé inconstitutionnel par la Cour Suprême en juillet 2014.

Pendant ce temps, dans la rue, 5000 manifestants tiennent un autre discours…

NON :

  • à la privatisation du métro
  • à l’expulsion des communautés urbaines pauvres
  • à l’accord de coopération militaire avec les EU (EDCA – Enhanced Defense Cooperation Agreement)
  • au recours massif à la contractualisation
  • au harcèlement des militants (syndicaux, paysans, étudiants, indigènes, des organisations de défense des droits humains)
  • aux exécutions extra-judiciaires (238 sous le gouvernement Aquino)

POUR :

  • un service de santé publique
  • un salaire minimum national (de 16.000 PHP/mois – environ 350 euros)
  • une véritable réforme agraire
  • la reprise immédiate des pourparlers de paix (avec les rebelles communistes)

NOYNOY :

  • menteur
  • voleur
  • pantin (des USA)
  • valet (des patrons)
  • roi du « pork barrel » (assiette au beurre)

MILITAIRES :

  • assassins
  • hors de communautés

ET AUSSI :

  • Boycott Tanduay (en mai/juin 2015, les ouvriers de cette distillerie, qui fabrique le rhum du même nom, ont mené une grève de 40 jours et obtenu la régularisation de 103 ouvriers en contrat précaire – Tanduay appartient au milliardaire Lucio Tan, big boss du groupe SM)
  • Justice pour les travailleurs de Kentex (située ans la banlieue de Manille, l’entreprise fabrique des tongues et autres produits en caoutchouc / le 13 mai 2015, 72 ouvriers périssent dans l’incendie de l’usine)
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