De l’eau minérale en sachet comme unique médicament, l’invocation répétée de Dieu et son pouvoir de guérison, quelques manipulations élémentaires, des engueulades… le traitement prodigué par Boulango Dabourgou comporte une bonne dose d’improvisation et le guérisseur n’en donne aucune explication rationnelle.
Il arrose collectivement les malades avec de l’eau minérale en sachet, invoque la guérison divine, papillonne d’un patient ou d’un groupe à l’autre selon une logique connue de lui seul, asperge encore et toujours d’eau minérale, questionne sans beaucoup s’attarder sur les zones douloureuses, tape du plat de la main sur les dos, les jambes, les épaules, malaxe les membres atrophiés de la plante du pied et des orteils, remet une dose d’eau minérale, encourage, rudoie, plaisante, se met en colère quand il estime qu’on lui fait perdre son temps… Boulango Dabourgou admet ne pas avoir de méthode, improviser en suivant son inspiration et ne pas être en mesure d’expliquer pourquoi ça marche.
Le traitement se déroule généralement en deux étapes. La première se passe aux « urgences », où les malades, allongés, sont arrosés puis exhortés à se lever et à gagner le plus rapidement possible le lieu où ils attendront – deux, trois, quatre jours, parfois une semaine ou plus – de défiler devant le guérisseur pour recevoir, individuellement cette fois, des soins qui se résument souvent à être une fois de plus aspergés d’eau minérale, avant être alors déclarés guéris.
Avant de quitter le campement, chaque patient est invités à revenir deux ou trois semaines plus tard, pour faire le point sur son état de santé et les résultats de la cure miraculeuse.
J’ai vu des personnes âgées et des handicapés mobiliser toute le énergie pour se mettre debout et faire quelques pas hésitants après avoir abandonné leur canne, leurs béquilles ou leur fauteuil roulant. Miracle ? Le guérisseur les encourage à continuer sur le chemin de la guérison faisant travailler leurs muscles – conseils pleins de bon sens qui n’auraient rien d’étonnant dans la bouche d’un kinésithérapeute.
Je n’ai pas vu de membres tordus se redresser comme par enchantement et les miraculés se mettre à gambader. Pas de miracle.
J’ai vu une jeune femme mal-voyante déchiffrer la date inscrite sur une feuille de papier après que le guérisseur lui l’eut arrosé d’eau et eut soufflé sur ses yeux – chose dont elle était incapable quelques instants plus tôt, jura-t-elle. Miracle ?
Je n’ai pas assisté aux traitements des sourds-muets et des déficients mentaux.
J’ai entendu des personnes déclarer que les douleurs (au ventre, au dos, aux reins…) dont elles souffraient avant leur visite au guérisseur avaient disparu. Miracle ?
J’ai vu le guérisseur s’attarder individuellement sur de jeunes enfants atteints de malformations des membres inférieurs et en faire hurler de douleur certains… sans qu’aucun d’entre eux retrouve l’usage de ses jambes ni parvienne à marcher seul – trop jeunes, les patients étaient-ils imperméables à la méthode Coué ? Quoi qu’il en soit : pas de miracle dans ces cas-là.
… à suivre