A la veille de quitter Manille pour General Santos, dans l’île de Mindanao, je fais quelques images d’une manifestation (une de plus) contre la criminalisation des opposants. Et de ma nouvelle résidence, je suis le dernier épisode du feuilleton « Duterte ou le mâle empire ».
Quatre anciens prêtres, trois pêcheurs artisanaux, l’ex-député Satur Ocampo et Victoria Tauli-Corpuz, représentante des Nations Unies pour les questions indigènes à Mindanao, figurent sur une liste de six-cents noms de présumés « terroristes » rendue publique début mars par le ministère de la justice philippin.
Normal !
En novembre dernier, encouragé par sa rencontre avec Donald Trump, le président Rodrigo Duterte, inscrivait le Parti communiste des Philippines et son bras armé, la Nouvelle armée du peuple, sur sa liste des organisations terroristes et, dans la foulée, menaçait de s’en prendre à la gauche légale, qualifiée de « front légal » de la guérilla.
Étiqueter de même une représentante des Nations Unies montre que le président philippin a de la suite dans les idées et peur de rien – même pas du ridicule.
Allez, encore un effort : les « terroristes » seront bientôt majoritaires aux Philippines, ils n’auront plus qu’à voter pour leur candidat et prendre très démocratiquement le pouvoir aux prochaines élections.
Satur Ocampo, ex-parlementaire inscrit sur la liste des présumés « terroristes » (photo de gauche).
Vendredi 23 mars, « Militer n’est pas un crime ! ».
Et maintenant la dernière, datée du 26 mars : des organisations de défense des droits humains sont financés par les narcotrafiquants pour faire capoter la campagne contre la drogue du président Duterte.
C’est Harry Roque Jr, porte-parole du gouvernement, qui le dit.
Et Alan Peter Cayetano, ministre des affaires étrangères lui fait écho.
Rappel : lancée par le président Rodrigo Duterte au lendemain de son élection (mai 2016) la guerre contre la drogue a fait 4.200 morts selon la police (plus de 12.000 selon Amnesty International) et 123.000 personnes ont été détenues dans le cadre d’opérations anti-drogue… « Ce qui prouve bien que nous ne les tuons pas tous », argumente en substance le porte-parole de la police.
Comme on pouvait s’y attendre, cette déclaration provoque une levée de boucliers.
Sur quels faits concrets se basent ces accusations ? interroge Human Right Watch.
La réponse vaut son pesant de cacahuètes : Euh… ouais bon, c’est vrai, le gouvernement ne dispose d’aucune preuve, aucune piste, zéro, pas le moindre soupçon d’indice pour étayer son hypothèse… mais que nous n’ayons rien trouvé, POUR L’INSTANT, ne signifie pas forcément que ces preuves n’existent pas, et nous continuons de chercher.
Bravo ! Enfin des gens qui ne baissent pas les bras face au premier obstacle venu.
Parions qu’avec autant de bonne volonté ils finiront par trouver.