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Au bonheur des investisseurs – « Le statut de zone économique spéciale permet aux investisseurs de bénéficier d’avantages spéciaux pour s’établir et maintenir leur compétitivité sur le marché global », affirment les promoteurs des ZES. La liste des mesures incitatives fiscales et non fiscales – exonération de taxe sur les bénéfices pendant 4 à 6 ans (renouvelable pour 2 ans puis limitée à 5%), exonération de taxe à l’importation sur les équipements et les matières premières, exonération de taxe à l’exportation, droits des investisseurs garantis (y compris contre d’éventuels changements politiques à la tête du pays), facilités d’installation – ont en effet de quoi séduire les dirigeants d’entreprises. D’autant que la main d’œuvre est abondante, qualifiée, largement anglophone, bon marché… et que les autorités philippines s’engagent à mettre en œuvre à l’intérieur des ZES : « une politique de paix industrielle et de productivité (…) en vue d’éliminer les conflits du travail inutiles ».
Résultat : plus de deux mille entreprises sont aujourd’hui enregistrées dans les 240 Zones économiques spéciales des Philippines.
Elles couvrent un large spectre d’activités industrielles, agro-industrielles et de services – de la confection aux composants électroniques, en passant par l’automobile, l’agroalimentaire, le tourisme, les banques, les call centers – et emploient quelque 700.000 salariés.
En 2011, selon les prévisions du PEZA (Autorité philippine des zones économiques spéciales), les ZES devraient générer 225 milliards de pesos d’investissements (environ 3,6 milliards d’euros) et 37 milliards de pesos d’exportations (environ 5,9 millions d’euros).
Ils en disent…
Sonny Africa, économiste de la Fondation IBON : « Les zones économiques spéciales sont l’une des pires expressions de la mondialisation capitaliste : leur production, exclusivement orientée vers l’exportation, ne répond pas aux besoins du pays ; elles n’ont pas d’effet d’entraînement sur l’économie car 95% des équipements et des matières premières sont importées et les transferts de technologies inexistants ; les emplois créés sont peu qualifiés, précaires et mal rémunérés ; enfin, les ZES contribuent activement au démantèlement de la législation du travail ».
Remigio Saladero*, avocat et conseiller juridique du KMU (Kilusang Mayo Uno, la principale centrale syndicale des Philippines). « La loi dit que ″les zones économiques spéciales sont régies par le code du travail philippin″ mais, précise-t-elle aussitôt, ″administrées comme des territoires séparés″ et elle ajoute que chaque ZES est habilitée à ″créer et équiper ses propres forces de sécurité interne″. De fait, alors que les infractions au code du travail sont nombreuses à l’intérieur des zones économiques spéciales, les autorités se montrent plus qu’indulgentes à l’égard des employeurs – surtout ne pas froisser les investisseurs ! –, et collaborent avec ceux-ci pour interdire aux travailleurs d’exercer leur droit fondamental à s’organiser, à se syndiquer ».
* Remigio Saladero a fait l’objet d’un appel urgent de Peuples Solidaires.
Daisy Arago, directrice du CTUHR (Center for Trade Union and Human Rights) : « Pressions pour empêcher les ouvriers de voter lors des élections professionnelles et création de syndicats « jaunes », appels à la délation, harcèlement, menaces, licenciements abusifs, listes noires, attaques contre les piquets de grève, violences exercées contre les syndicalistes et leurs familles par la police, les compagnies de vigilance privées et l’armée… Dans les ZES, employeurs et autorités usent de tous les moyens pour imposer leur politique de ″no union, no strike″ – ni syndicat, ni grève ».
– à ce propos, lire : Zones franches (article de Philippe Revelli paru dans Le Monde Diplomatique de juin 2008) et Philippines / Les violences continuent (appel urgent de Peuples Solidaires).
Entrevue avec Bambi Valenciano – assistante légale du WAC (Worker Assistance Center) / audio in English