Cambodge 2012

Cambodge

Les terres (mal acquises) de la Phnom Penh Sugar Co

En 2009, Mr Ly Yong Pat, membre influent du parti au pouvoir et homme d’affaire prospère, a obtenu des « concessions foncières économiques » sur 20.000 hectares de terres destinées à la production de sucre dans la province de Kampong Speu.

« Amener les pays les plus désavantagés à partager les fruits de la libéralisation du commerce » . Tel est, selon Pascal Lamy, commissaire européen chargé du commerce, l’objectif du programme « Tout sauf les armes ».
Adopté en 2001 par l’Union Européenne, ce programme élimine les contingents et droits de douane sur la totalité des produits, à l’exclusion des armes, importés des 48 pays les plus pauvres du monde. Le sucre cambodgien en bénéficie depuis 2006.
Nationales ou étrangères, des entreprises agroindustrielles se sont engouffrées dans le créneau et les exportations de sucre cambodgien ont doublé entre 2010 et 2011. Le nombre d’expulsions et de conflits de terre liés à l’expansion des plantations de canne à sucre s’est lui aussi considérablement accru.

Deux sociétés agroindustrielles (toutes deux appartenant à Mr Ly Yong Pat) ont été crées pour l’occasion : la Phnom Penh Sugar Co et la Kampong Speu Sugar Co.
Problème : les concessions de Mr Ly Yong Pat empiètent sur les terres cultivées par les villageois.
Dans le cas de la commune d’Am Laing (district de Thpong) la Phnom Penh Sugar Co s’est ainsi approprié 2.000 hectares de terres auparavant destinées à la culture du riz et autres productions vivrières.
Selon le Cambodian center for human rights, environ un millier de familles auraient ainsi été lésées.
Le 18 mars 2010, quelques 500 personnes venues des onze villages affectés ont manifesté devant les locaux de la compagnie sucrière… Après quoi des troupes du Bataillon 313 ont été déployées pour défendre les terres de la compagnie et, aujourd’hui, ce sont toujours des militaires qui assurent la garde des plantations et de l’usine.
En l’absence de toute organisation paysanne, la plupart des villageois se sont rapidement résigné. Certaines familles ont accepté la proposition de réinstallation dans le village de Pis, assortie de l’attribution d’une parcelle de 20X50 mètres (bien moins que les cinq à dix hectares qu’ils cultivaient précédemment) et d’une indemnisation… de 25 dollars ! Mais les terres de ce village, coincé entre les plantations de canne et la montagne, sont rocailleuses et impropres à la culture du riz.
Privés de leurs moyens de subsistance, les villageois n’ont souvent d’autre solution que de s’embaucher comme travailleur agricole pour la Phnom Penh Sugar Co.

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