Chine 2014

Chine

Hong Kong (6) La police « nettoie » Causeway Bay

Ce matin, la police a expulsé les derniers des derniers militants d’Occupy Central qui campaient encore sur Hennessy Road, à Causeway Bay. La chose s’est faite poliment, sans brutalité. Vingt personnes ont été arrêtées mais, à l’heure où j’écris ces lignes, elles ont sans doute été libérées.

Raconter une expulsion qui ressemble, en modèle réduit, à la précédente ? Bof… Je préfère noter quelques réflexions et autres choses entendues, qui font écho aux inquiétudes exprimées dans un courrier reçu il y a quelques jours (merci Jérôme).

Un militant et intellectuel de gauche – ça existe à Hong Kong, j’en ai rencontré –, explique que :

  • Hong Kong est une place financière majeure, pas un bastion ouvrier, où le système capitaliste n’a jamais été remis en cause – pas plus du temps des anglais que depuis la rétrocession de la colonie à la Chine.
  • Le spectre politique local se réduit aux pro-Beijing et aux pro-démocrates, sans que cela implique un quelconque contenu social.
  • Il existe un fort sentiment anti-chinois dans la population de Hong Kong – les communistes c’est mauvais, point –, et la répression de Tienanmen – un véritable traumatisme qui est commémoré chaque année à Hong Kong – n’a rien arrangé.
  • La Confédération des syndicats de Hong Kong (HKCTU) a appelé à la grève générale – très peu suivie et vite abandonnée – et fourni une aide logistique appréciable au Mouvement des Parapluies… ce qui n’a pas empêché certains groupes de demander à la HKCTU de retirer ses banderoles et aux quelques militants de gauches de ne pas se manifester. Et comme, à Hong Kong, existe une culture bien ancrée de non-confrontation, les uns comme les autres ont gentiment obtempéré.
  • Le niveau de conscience politique d’une grande partie des étudiants et lycéens – moteur et principale force du Mouvement des Parapluies – frôle le zéro pointé.

* * *

Illustration de ce qui précède par le compte rendu, un poil caricaturé, d’une entrevue avec un « journaliste citoyen » bossant pour un média alternatif.

Q : Quelles sont les options politiques des différentes composantes du Mouvement des Parapluies ?
R : …
Q : Il y a bien plusieurs groupes qui participent au Mouvement des Parapluies, non ?
R : Ah oui ! Il y a Occupy Central, la Fédération des Étudiants et Scholarism.
Q : Tous sont-ils sur la même ligne politique ou y a-t-il des divergences ?
R : Ben… euh… Occupy Central a été fondé par Benny Taï, la Fédération des Étudiants de Hong Kong c’est les étudiants et Scholarism les lycéens.
Q : Mais ont-ils des lignes politiques identiques ?
R : …
Q : Certains ont-ils des revendications sociales ?
R ; …
Q : Demandent-ils tous la même chose ?
R : Oui, la démocratie et un scrutin véritablement libre.

* * *

Ceux qui espèrent des bouleversements politiques à Hong Kong risquent donc de rester sur leur faim… mais faudrait pourtant pas jeter le bébé avec l’eau du bain : jamais Hong Kong n’avait connu de mobilisation de cette ampleur.
Et selon le même militant de gauche :

  • Avant Occupy Central, on ne discutait pas politique à Hong Kong. Maintenant si. Et un jour ou l’autre, on abordera inévitablement les questions sociales.
  • Des slogans, poèmes, messages, textes à contenu politique et social de gauche ont été tagués, collés, accrochés sur les murs d’expression libre – contre la concentration de la propriété immobilière, pour une réduction des horaires de travail, pour un droit accru à la négociation de conventions collectives (je le crois sur parole car, pour moi, c’était du chinois).
  • Avec le Mouvement des Parapluies, des milliers de personnes, surtout des jeunes, ont fait l’expérience (joyeuse, enthousiasmante) de l’action collective. Et ça pourrait bien changer la vie de certains. Alors que dans les immeubles de Hong Kong on ne connaît souvent pas ses voisins, là, les gens se sont rencontré, se sont parlé, ont échangé, noué des amitiés.

Voilà. C’est loin de faire le tour du problème, juste quelques éléments à cogiter.

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